Comment faire vivre le Rouinet ?
Photo : Réunion de crise au Rouinet à Fourques avec les amapiens le soir du 12 septembre : Anne-Marie cherche un repreneur et l’Amap a besoin de vendre plus de paniers.
Créée en 2006 par Anne-Marie Pelizzari, l’Amap du Rouinet est aujourd’hui dans une situation financière critique. Les nouveaux contrats entre l’exploitation agricole et les « consom’acteurs » qui s’y nourrissent seront signés début octobre. Les prix des paniers vont évoluer à la hausse. L’objectif : arriver à l’équilibre dans six mois. Ensuite ? Advienne que pourra.
Tout le monde n’avait pas conscience de la gravité de la situation. Le 12 septembre au soir, Anne-Marie Pelizzari, maraîchère, fille, petite fille et arrière petite fille de maraîchers, fondatrice de l’Amap du Rouinet a donné rendez-vous aux consommateurs (on appelle ça des consom’acteurs dans le jargon des Associations pour le maintien d’une agriculture paysanne, les fameuses Amap) dans son hangar du mas Sainte-Marie, à Fourques. Beaucoup le savaient : il manquait 60 adhérents pour que l’Amap parvienne à son objectif initial de 200 paniers hebdomadaires. Mais même cette hausse de la clientèle ne suffirait plus à tirer le Rouinet d’affaire : en mars 2020, fin d’échéance du prochain contrat qui sera signé en octobre, le déficit de l’exploitation d’Anne-Marie devrait être de 54 000 euros.
Le Rouinet, c’est six hectares de maraîchage, six salariés dont un à mi-temps, des pratiques agricoles novatrices qui se tournent vers la permaculture, et une Anne-Marie qui ne se paye plus depuis 3 ans. Elle a même dû, à la fin de l’été, prendre un emploi à Carrefour Drive pour se dégager, enfin, un revenu. Un plein temps qui s’ajoute au temps plein de l’exploitation. Les 200 000 euros de chiffre d’affaire au dernier exercice n’y font rien : les salaires et charges MSA coûtent 140 000 euros au Rouinet. Et les charges d’exploitation montent à 70 000 euros. Depuis quelques années, le déficit s’accumule. En 2018, il était déjà de 6 848 euros. Malgré la diversification des débouchés vers les restaurants et les cantines, malgré une légère hausse des prix des paniers, « les charges ont augmenté plus vite que les recettes » explique Anne-Marie, épuisée mais toujours souriante. Elle a même le sourire quand elle dit qu’elle ne peut plus travailler dans ses terres, physiquement. Et le même sourire, malgré les larmes aux yeux, quand elle annonce sa décision : « Je cherche un repreneur, qui reprenne sous forme d’Amap ou d’autre chose. C’est pas dramatique, l’important c’est d’arrêter avant que ce ne soit trop grave. Moi, je n’ai plus le courage de vous nourrir au printemps prochain. »
Plus de paniers pour s’en sortir
Mais la question n’est pas encore de savoir ce que deviendra l’Amap après le mois de mars 2020. L’urgence, c’est les six mois à venir, les 54 000 euros. Et même plus : « Il faut aussi dégager un salaire pour Anne-Maire ! » lance une amapienne. La première des décisions, c’est le changement de taille des paniers, et l’augmentation des prix, aujourd’hui très largement en deçà de ceux du marché. Désormais, fini les demis paniers et les paniers pleins. Il n’y aura plus qu’une taille, intermédiaire, à 15 euros. Ce qui devrait faire monter pour les six mois à venir le chiffre d’affaires à 273 000 euros, si les 350 familles d’amapiens pour 200 paniers continuent de se nourrir au Rouinet. Autre solution trouvée : la mise en place de nouveaux points de distribution. En plus des deux distributions hebdomadaires à l’Amap, les mardis et les vendredis, et le mardi de 18h à 19h à la boutique Glaneurs Glaneuses rue de la place à côté du Forum, les amapiens pourront venir chercher leurs paniers à l’école Mopa le lundi de 16h 45 à 18h et à la maison de retraite Les Iris, à Raphèle, le jeudi de 17h à 18h 30. L’Amap va aussi faire les démarches pour obtenir une certification bio. Une solution pour développer ses ventes auprès des restaurants et des cantines.
Et pour la suite ? Après le printemps 2020 ? La réflexion ne fait que s’engager. Chaque amapien est invité à y prendre part. Et à continuer à attirer de nouveaux consom’acteurs vers les paniers du Rouinet. C’est en étant plus nombreux à manger des légumes qu’on rendra peut-être la banane à Anne-Marie et son Rouinet.
Nicolas Puig
Infos pratiques :
Mas Ste Marie, Chemin du Rouinet, 30300 Fourques Téléphone : 04 90 93 34 32, ou 06 21 06 12 63
Mail : fruitsetlegumes.pelizzari@wanadoo.fr
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