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« On peut être reine d’Arles et homosexuelle »

« On peut être reine d’Arles et homosexuelle »

Clément Trouche, 35 ans, spécialiste du costume à Arles, n’a jamais caché son homosexualité au milieu de la tradition. Nathalie Chay, 19e reine d’Arles entre 2005 et 2008, n’a pas eu cette possibilité. Aujourd’hui âgée de 37 ans, elle revient sur son histoire, en espérant que les jeunes femmes qui portent le costume puissent vivre pleinement leur passion quelles que soient leurs sensibilités et leurs trajectoires de vie. Interview croisée avec deux références dans le milieu de la tradition, membres du jury de l’élection de la dernière reine d’Arles en 2021.

Propos recueillis par Eric Besatti. Photographies de Vanessa Sirven.

Vous avez fait partie tous les deux du jury qui a élu la 24e reine d’Arles, Camille Hoteman. Comment avez-vous été sélectionnés ?
Nathalie Chay : Il est d’usage qu’il y ait une ancienne reine d’Arles dans le jury. Marie-Claude Robles, la présidente du Comité des fêtes m’a sollicitée. Maintenant ma vie est affichée, je ne cache plus mon homosexualité mais il y a des personnes qui sont au courant, d’autres non. Je le lui ai signalé pour qu’elle prenne la décision en connaissance de cause en sachant qu’il pourrait y avoir des retours un peu mitigés. Elle le savait déjà et elle m’a assuré que ça n’était pas rentré en ligne de compte. J’ai trouvé ça très progressiste. Le fait de nous nommer tous les deux au jury, c’était du courage de sa part. C’était aussi un engagement parce que c’était un jury exceptionnellement jeune. Il fallait un peu d’audace pour l’oser. Bravo à elle. Elle m’a choisie pour ma personnalité et l’empreinte que j’ai laissée de mon règne et je l’en remercie.

Du courage ? C’est ce que ça demande pour parler d’homosexualité dans ce milieu-là ?
En tant que filles, on nous dit qu’on va faire un joli mariage avec un prince charmant, on nous imprègne des clichés hétéronormatifs qui dominent notre société. Quand on se rend compte que ce n’est pas ça qui va nous rendre heureuses, c’est dur à accepter. Faire ce cheminement dans le milieu des traditions, c’est un petit peu plus compliqué que dans d’autres.

Dans mon discours, je ne veux pas être choquante envers d’autres personnes. J’ai moi-même eu du mal à accepter mon propre ressenti. Donc j’imagine que c’est encore plus dur à comprendre pour ceux qui n’ont jamais ressenti ce genre d’attirance ou de sentiment.

Mais le monde des traditions n’est pas le seul à être difficile. Le milieu du sport est aussi fermé à ce sujet. C’est compliqué de révéler son homosexualité quand on est un footballeur ou un rugbyman. C’est aussi compliqué dans certaines familles ou quartiers où le poids de la religion pèse… Ce n’est pas la tradition qui est particulièrement fermée. C’est la société en général qui est en train de faire du chemin. Dans certains milieux ça va plus vite que dans d’autres.

Comment pourrait-on qualifier votre personnalité ?
Nathalie Chay : J’ai un franc parler. Aujourd’hui, j’ai 37 ans, j’ai mon avis sur le règne que j’ai passé, j’ai mon avis sur ce que sont devenues les choses entre temps. J’ai mon avis sur la tradition aujourd’hui. Et tout ça je ne m’empêche pas d’en parler quand l’occasion est bonne, quand le débat peut être constructif. Maintenant, je ne vais pas envoyer des pavés dans la mare juste pour faire réagir, ce n’est pas mon genre. Aujourd’hui, ça peut être constructif de parler d’homosexualité ouvertement.

Sur sept membres de ce jury, il y avait donc deux homosexuels et…
Clément Trouche : Un curé…

C’est intéressant le mélange qu’arrive à créer le milieu de la tradition avec l’exemple des membres du jury.
Nathalie Chay : Je pense sincèrement que certains membres du jury ne savaient pas. C’est tellement un fait établi que dans la tradition on est tous hétérosexuels, que personne ne se pose la question. Et nous, on n’a jamais fait de démonstration extravagante de notre homosexualité. Il y a beaucoup de gens qui ne veulent pas le voir et qui ne le verront jamais.

Clément Trouche : C’est un non-sujet. Ce qui se passe dans notre vie et dans notre lit ne regarde personne. On ne devrait pas être considéré différemment si l’on vit avec une personne du même sexe.

Nathalie Chay : C’est parce que ça ne regarde personne que nous prenons la parole. C’est contradictoire, mais je trouve ça intéressant. Mon but : qu’il y ait des jeunes filles ou hommes qui s’épanouissent librement. A l’inverse de ce que j’ai vécu. On ne peut pas vivre dans le refus de ce que nous sommes vraiment. C’est une souffrance et une perte de temps.

Pourquoi est-ce important pour vous d’en parler aujourd’hui ?
Clément Trouche : Ce qui me rend triste, c’est qu’il y a encore des jeunes dans le déni qui se cloîtrent, qui ont peur d’être ce qu’ils sont. Non, être homosexuel ne t’empêche pas d’être un bon gardian, ne t’empêchera pas d’être, pourquoi pas, le meilleur raseteur d’une génération ou d’être une reine d’Arles.
Nathalie Chay : Quelle que soit ta sexualité, ça ne change rien à tes possibilités de succès. C’est le message. Aux personnes qui pourraient avoir un discours négatif envers nous ou envers des personnes qui s’assumeraient en tant qu’homos, on veut dire : ouvrez les yeux, on parle d’amour. L’homosexualité a toujours existé et existera toujours, c’est une réalité vieille comme le monde.

Vous dites que vous n’avez pas envie que les jeunes vivent la même chose que vous…
Nathalie Chay : Pour moi, ce n’était pas pensable d’être homosexuelle. J’ai une relation très profonde avec ma mère et j’ai toujours tout fait pour la rendre fière. L’homosexualité n’était pas ce qu’elle imaginait pour sa fille. J’ai d’abord refusé de le voir, parce que, pour moi, je ne pouvais pas. Ce n’était pas ma vie. Et puis on mûrit, on apprend à faire ses propres choix et à ressentir ses propres émotions. A prendre les conseils, mais à choisir sa route. La première des erreurs que j’ai faites, c’est d’avoir annoncé mes préférences très tard à ma mère : à 29 ans. Pour elle, ça a été difficile et je la comprends.

Pendant votre règne, c’était inenvisageable d’en parler ?
Nathalie Chay : À ce moment-là, j’étais dans le déni. Je me disais « ce n’est pas du tout le « bon chemin » à prendre, recentre-toi. » J’avais eu un flirt de vraiment rien du tout avec une fille et ça m’avait chamboulée complètement. Je gardais ça secret. C’était la période où je pouvais poser ma candidature pour l’élection alors j’ai postulé d’abord par conviction mais un peu aussi pour rester dans le « bon chemin ».

Je me suis dévouée corps et âme à l’apprentissage de plein de choses sur l’histoire, sur le costume, sur la roussatine (la passion et le mode de vie liés au cheval Camargue, ndlr), tout un tas de choses qu’on apprend quand on veut se présenter à l’élection. Et j’ai eu ce titre. C’était inespéré. Déjà, j’étais de Tarascon, attention, c’était un autre continent (rires). Imaginez que j’ai eu les yeux bridés (rires). C’était ça le plus gros défi de mon règne faire accepter Tarascon. Donc l’homosexualité ! Impensable ! Même moi je me l’interdisais.

Être reine d’Arles, ça vous a mise entre parenthèses ?
Nathalie Chay : Pendant le règne, j’ai complètement laissé de côté ma vie amoureuse. Je n’ai quasiment pas eu d’histoires. A l’époque, j’essayais encore de sortir avec des garçons. J’ai dû avoir trois ou quatre bisous de temps en temps, mais pas plus, ça ne m’intéressait pas. Etre reine d’Arles a été une merveilleuse expérience riche d’enseignements et remplie de beaux moments. Dans de nombreux domaines ça m’a permis de me construire, de me connaître mais pour ce qui est de mon intimité, ça m’a éloignée de moi-même, j’étais concentrée sur la fonction. Paradoxalement, dès que la fonction a pris fin, la confiance en moi que j’ai emmagasinée m’a permis de vivre autre chose. D’accepter. C’était comme une dead-line, j’avais fait mon abstinence pour me remettre sur le « droit chemin » ça n’a pas marché. Maintenant : « J’ai le droit, je ne vais pas aller contre ça toute ma vie. »

Clément, avez-vous eu aussi des difficultés à assumer votre homosexualité ?
Clément Trouche : Mes parents ont été ouverts très rapidement, ils ont favorisé mon développement personnel et mon bonheur. Ils ont fait le deuil de l’enfant qu’ils avaient projeté. Oui, mon père aurait rêvé que je me marie avec une reine d’Arles, sortir de l’église de la Major et tout ça. A 18 ans j’avais fait mon coming out et je m’affichais avec un garçon, que ce soit dans ma vie privée ou dans le milieu traditionnel dont mon copain était issu. Ça n’a rien changé pour mon entourage.

Quand je passais mon adolescence à cheval, j’ai rêvé à ces figures qui étaient manadiers et qui, paraît-il, aimaient les hommes. Pourtant, dans mon entourage cela paraissait lointain. Je me sentais quand même seul à être ainsi dans mon groupe d’amis. Mais je me projetais parce que j’avais une image de référence qui permettait de me dire « c’est faisable ».

Nathalie Chay : C’est exactement ce pourquoi je veux parler aujourd’hui. Clément s’est dit « je peux le faire » parce qu’il avait l’image de grands manadiers, de personnes qui ont eu une place dans la tradition et qui ont eu cette vie là. Et quelque part, ça l’a « dédouané ». Je n’ai pas eu cette chance. Je veux dire aux jeunes : on peut être reine d’Arles et homosexuelle.

Qui sont ces figures qui assumaient leur homosexualité dans le milieu de la tradition ?
Clément Trouche : Il y a les gens connus comme ouvertement homosexuels comme Jean Lafont (grand manadier ayant remporté dix Biòu d’or, capitaine de la Confrérie des gardians, créateur de la Churascaïa, une boite de nuit mythique dans sa manade qui mélangeait tous les publics, ndlr). J’ai aussi côtoyé un manadier, un grand, quand il était alors un vieux monsieur. Il a d’abord été marié, il a eu des enfants. C’est après qu’il a réussi à assumer son homosexualité. Les gens aujourd’hui ne le savent pas et ses enfants peut-être n’assument pas. C’est toujours un peu difficile de lancer des noms comme ça dans la presse. Au fond ça ne regarde personne. En tout cas, ce n’est pas à nous de le dire pour quelqu’un d’autre.

Nathalie Chay : Qui aurait pu me donner confiance ? Me dire : « Tu peux quand même t’assumer et vivre ta vie personnelle et rester dans le milieu du costume. » À ma connaissance, personne. La seule qu’on pourrait citer comme femme qui casse les codes, c’est Fanfonne. Et encore, Fanfonne (lire p.20), elle est « juste » montée à califourchon comme les hommes et a ainsi transgressé les normes de genre de l’époque. C’était sa manade, elle était propriétaire et elle avait le droit de faire ce qu’elle voulait. Elle était chez elle. Grâce à son exemple, les femmes ont depuis pu prendre une place de premier plan dans le milieu de la bouvine.

Clément, comment vous êtes-vous affirmé au fil des années ?
Clément Trouche : Je passais du temps à la manade et il fallait trier les bêtes, accompagner les promenades à cheval, faire les ferrades et participer à la vie d’une manade etc. J’étais aussi dans un groupe folklorique qui mêlait danse et costume. J’avais deux facettes. Le costume m’intéressait beaucoup. Pour préparer et habiller les Arlésiennes, je commençais déjà à mettre en pratique les gestes que j’observais depuis des années. J’allais chercher de l’intérieur ce qui m’intéressait. Au plus je me suis affirmé dans le costume, au plus je me suis éloigné du milieu taurin. Au milieu des Arlésiennes j’étais moins confronté à certaines difficultés. Je sentais que je serais plus accepté, j’avais plus de facilité à être moi, sans concession, on avait plus de choses en commun à partager. Dans une manade, toutes les trois minutes tu entends : « c’est pas un truc de pédé » ou « c’est pas un truc de tafioles… tapettes…» etc.

Nathalie Chay : Je préfère penser que n’est pas de l’homophobie pour faire mal. C’est plus des déformations de langage.

Clément Trouche : Ce sont effectivement plus des habitudes de langage que réellement un acte homophobe, j’ose continuer à le penser, mais cela n’aide pas un adolescent qui se sent concerné par ces actes et mots gratuits.

Avez-vous vécu des actes homophobes ?
Clément Trouche : J’ai été confronté à l’homophobie dans une institution organisatrice d’événements de la part d’un responsable. Un cas isolé. Mais j’ai été défendu par un gardian professionnel, lui aussi homosexuel, parce qu’il y avait une injustice de traitement. Il s’avère que ce responsable faisait facilement des remarques homophobes en mon absence et avait de la réticence avec l’acceptation de ma personne. Il ne me voyait que par le prisme de mon homosexualité. C’est typique des homophobes. Notre sexualité est un non sujet pour nous. Paradoxalement, les seuls actes homophobes que l’on peut subir sont généralement engendrés par des gens qui ne pensent que par le spectre de la sexualité ou qui ont des peurs profondément ancrées en eux.

Vous n’étiez donc pas le seul homosexuel à aider les filles à se costumer ?
Clément Trouche : Il y a toujours eu à Arles et dans les villages beaucoup de garçons qui ont coiffé des dizaines, des centaines d’Arlésiennes. Ils ont appris et transmis les gestes du costume. Moi je suis l’un des petits jeunes. J’ai eu certainement moins peur qu’eux de faire des choses en pleine lumière et j’ai voulu apporter ma pierre à l’édifice. Je fais partie de la partie émergée de l’iceberg. Dans la partie immergée, je pense à plein de garçons du pays d’Arles, de Châteaurenard à Fontvieille en passant par Mouriès… Le fait de ne pas porter le costume nous le fait regarder différemment. On prend plaisir à aider les autres, à les révéler. J’ai voué une partie de ma vie à ça, comme plein d’autres. Certains sont restés mariés avec des femmes parce qu’ils n’avaient pas le choix à ce moment-là.

Nathalie Chay : De plus, ces hommes proches du costume sont appréciés dans le milieu par les Arlésiennes parce qu’ils sont généreux et ont une place essentielle. Ce sont des aides précieuses, on peut compter sur eux pour apporter de la connaissance ou quand on est en galère pour se coiffer à 4 h du matin avant une sortie.

Clément Trouche : Je vois des jeunes garçons qui assument aujourd’hui, et ça ne pose aucun problème pour les jeunes filles qui les entourent. Mes copines, c’était mes modèles, c’était mes « poupées ». Sans pour autant généraliser que tous les gays aiment jouer à la poupée, j’espère qu’on n’en est plus là. Mais c’est avec elles que j’ai testé beaucoup de choses. Elles ne ressentaient pas la frontière de l’hétéro les désirant. Tout ça m’a donné accès au costume d’Arles, dans ce qu’il a de plus intime chez l’Arlésienne.

Nathalie Chay : Statistiquement, il y a toujours quelques garçons par génération qui vont coiffer les Arlésiennes. Il y aura une ou deux filles qui se coiffent en Arlésienne qui sont homos, qui veulent assumer ou pas. Il y a toujours un gardian ou deux, qui va être homo et qui va être refoulé toute sa vie parce qu’il n’aura pas le courage et peut-être pas la possibilité de s’assumer. Pour la reine d’Arles, statistiquement, la prochaine, c’est pas avant le siècle prochain. (Rires) Mais qui sait ?!

En fait, les homosexuels qui coiffent et habillent les Arlésiennes, c’est une tradition…
Nathalie Chay : Et qui sont homos ou hétéros, on n’en sait rien.

Clément Trouche : C’est quand même beaucoup des homos.

Nathalie Chay : Les garçons sont plus visibles. Les filles ne sont pas visibles dans ce milieu-là. On en rit toujours chaque année à la fête vierginenco des Saintes-Maries-de-la-mer (fête de passage à l’âge adulte où les jeunes filles prennent le ruban et deviennent femmes en portant le costume en entier, ndlr).

Clément Trouche : On se dit, en comptant 70 à 90 vierginenco chaque année, statistiquement, combien y a-t-il d’homosexuelles par décennie ? Nathalie, tu ne peux pas être statistiquement la seule. Je crois que les générations actuelles sont plus aptes à assumer que chacun ait sa propre sexualité. Je suis curieux de voir ces évolutions, avec de plus en plus d’adolescents non binaires, qui se posent des questions sur le genre et toutes ces questions nouvelles dans la société. Comment peuvent évoluer des enfants comme ça dans la tradition ? A mon petit niveau, j’essaierai d’être attentif à ça. Pour que chacun trouve sa place comme j’ai trouvé la mienne.

Nous sommes des pivots entre deux générations, à nous de faire les passerelles. À notre échelle, on a la chance d’être reconnus pour nos qualités dans le milieu traditionnel, si on peut faire des gestes pour faire évoluer la situation, ce sera déjà ça.

Avec Nathalie, nous faisons attention avec le mot tradition. Quand les filles à l’élection nous disaient : « J’aime me costumer parce que c’est la tradition », on les poussait en leur demandant : « Toi t’es quoi, t’es une fille du XXIe siècle qui se coiffe tous les week-ends. Tu penses costume, tu manges costume, tu dépenses costume, matin, midi et soir. Pourquoi ? C’est pas pour la tradition. C’est parce que ça te fait plaisir et que ça fait partie de toi… »

Nathalie Chay : Aux présélections pour la reine d’Arles en 2021, ça nous a tenu à cœur avec Clément d’aller plus loin que les poncifs : « On porte le costume parce que ma grand-mère portait le costume. » On s’en fout de ça : « Quel plaisir tu prends, en quoi ça résonne en toi ? » On a essayé de creuser plus loin.

Clément Trouche : D’effacer de leur langage tous les discours et les idées préconçus. On leur disait : « Parle nous de toi, de qui tu es. »

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l’Arlésienne n°18 – hiver 2024