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Taché, l’extrême droite tradi et polie

Taché, l’extrême droite tradi et polie

Il ne reste plus que quelques jours avant le premier tour des législatives anticipées. Le député sortant de la 16ème circonscription, Emmanuel Taché de la Pagerie, espère être réélu et fait campagne a minima, sans réunion publique ou meeting, mais avec des distributions de tracts et de l’affichage. Élu depuis juin 2022, quel est le bilan de ce député du Rassemblement national ? 

Fête de la Tarasque, pèlerinage d’octobre aux Saintes, course de satin au domaine de Méjane… C’est lors des fêtes traditionnelles et religieuses que le député sortant peut le plus souvent être aperçu. Parachuté dans la 16ème circonscription lors des dernières élections législatives en 2022, Emmanuel Taché de la Pagerie n’a pas de permanence, mais il s’est frayé un chemin dans le milieu de la tradition.

Sur les questions locales, il s’est fait le porte-parole du territoire en novembre 2022, à travers la défense de la tauromachie face à la proposition de loi d’abolition de la corrida portée par Aymeric Caron, député LFI. Plus récemment, il s’est joint à la mobilisation contre le projet de ligne très haute tension porté par RTE, dont l’opposition fait l’unanimité sur le territoire. Il semble également en lien étroit avec le milieu agricole, interpellant à de multiples reprises le gouvernement sur les restrictions de pesticides et les conséquences néfastes pour les agriculteurs de ces régulations (1). Il a par exemple dénoncé l’interdiction des pesticides dans les zones natura 2000, ou encore les difficultés rencontrées par des cultures spécifiques comme la pêche ou la cerise, à la suite d’interdiction de produits phytosanitaires. Il a également pris la défense de la riziculture camarguaise, se plaignant d’un manque de soutien de l’État lors d’une question posée au gouvernement en septembre 2022 : “Concrètement, les riziculteurs se plaignent de la longueur des délais pour obtenir des dérogations et du discours ambiant stigmatisant l’usage des phytosanitaires plutôt que de trouver un meilleur usage de ces derniers, afin de favoriser cette culture”. Il a également porté la défense de la culture et des traditions locales, avec une proposition de loi “visant à protéger les acteurs des fêtes traditionnelles” ou encore une question au gouvernement s’inquiétant du manque de moyens de l’enseignement du provençal.

Emmanuel Taché, de son nom de naissance, est un ancien chroniqueur de mode, chevalier de l’ordre des arts et des lettres. Né en 1975 à Montreuil, il a d’abord été membre du RPR devenu ensuite l’UMP, étiquettes sous lesquelles il a officié en tant que conseiller municipal et attaché parlementaire. En parallèle, il milite pour les défense des droits LGBT au sein de l’association Gaylib, qu’il a co-fondé, aux côtés notamment de son compagnon Sébastien Chenu, l’actuel vice-président du Rassemblement national. Après avoir participé aux campagnes présidentielles de Nicolas Sarkozy, il migre de la droite à l’extrême droite et rejoint le Front national en 2012.

Un élève assidu qui suit les consignes
En temps que député, il est plutôt bon élève, avec un taux de présence de 86% aux votes solennels, pour une moyenne de 83% sur l’ensemble des députés. Durant son mandat, il est également actif sur des questions de précarité ou de handicap. Il est membre de la commission des affaires sociales et rapporteur pour la proposition de loi d’Aide universelle d’urgence pour les victimes de violences conjugales, adoptée à l’unanimité en janvier 2023. Ses votes sont dans leur très grande majorité alignés sur ceux du Rassemblement national, avec une loyauté de 98% à son groupe parlementaire (2).

Qu’est-ce que défend le RN à l’assemblée nationale ? Réponse en quelques exemples.
. Sur l’énergie : la défense du nucléaire, l’opposition au développement des énergies renouvelables.
. Sur l’agriculture : la défense du développement des bassines de stockage d’eau, la défense de l’utilisation des pesticides, l’opposition à des objectifs de décarbonation, l’abstention sur le soutien aux filières bio.
. Sur l’environnement : l’opposition à la lutte contre l’artificialisation des sols, ou au moratoire sur l’exploitation minière des fonds marins.
. Sur le social : l’opposition à la revalorisation du Smic et à l’indexation des salaires sur l’inflation, la suppression des indemnités chômage pour les salariés en CDD qui refusent un CDI, et bien sûr le soutien au projet de loi contre l’immigration.

L’immigration toujours pour cible
Cette dernière a largement été censurée par le conseil constitutionnel. Amnesty international a dénoncé cette loi comme une manifestation de “la désinformation et les clichés xénophobes”, en ce qu’elle “transforme les personnes migrantes en menace au lieu de répondre aux véritables enjeux documentés par les associations de terrain. Résultat : de nombreuses mesures répressives et indignes ont été votées et ont irrigué le débat public”.

Une perception toute particulière des personnes migrantes largement véhiculée par le Rassemblement national et Emmanuel Taché de la Pagerie. En juin 2024, il relaie une pétition intitulée “Non à l’aide juridictionnelle pour les clandestins!” et commente : “À défaut d’accès aux services publics, vous serez « heureux » d’apprendre qu’avec vos impôts, le Conseil constitutionnel autorise les clandestins à l’accès à l’aide juridictionnelle, normalement, réservée aux plus vulnérables…” Une préoccupation sur la question de l’immigration qui revient aussi dans ses questions au gouvernement, dans lesquelles il s’inquiète par exemple du peu de moyens alloués aux contrôles aux frontières ou à l’exécution des obligations de quitter le territoire français.

À l’échelle locale, questionné par l’Arlésienne, il se dit opposé à la régularisation de la main-d’œuvre étrangère à laquelle a recours l’agriculture provençale massivement depuis des années. “À un moment donné, il faut être droit dans ses bottes, si ses gens là sont rentrés sur le territoire sans papiers, ils sont de fait hors-la-loi, alors pourquoi ne quittent-ils pas le territoire.”

 


Le RN, un parti d’extrême droite 

“Extrême droite ça ne veut rien dire”, réagissait le député sortant dans son interview à La Provence du 15 juin. “J’imagine que ce sont les mêmes qui ont soutenu les terroristes du Hamas ?”, appuyait-il à destination des manifestants mobilisés contre l’extrême droite tous les samedis depuis la dissolution de l’assemblée nationale. Mais, qu’il le veuille ou non, les mots ont un sens. Classé à l’extrême droite dans une circulaire du ministère de l’intérieur à la suite des élections sénatoriales, le Rassemblement national avait saisi le Conseil d’Etat pour contester cette catégorisation. Cette requête a été rejetée le 11 mars 2024, confirmant le classement du RN à l’extrême droite.


 

Eric Besatti et Clémentine Morot-Sir

 

  1. https://www.nosdeputes.fr/emmanuel-tache-de-la-pagerie
  2. https://datan.fr/deputes/bouches-du-rhone-13/depute_emmanuel-tachedelapagerie
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