Carnaval sauvage, une tradition nouvellement réprimée
Pourtant sans danger, sur les quais du Rhône, le brûlage de Caramantran du carnaval sauvage a été gêné puis réprimandé par la police municipale pour la première fois de son histoire. Le festaïre qui a allumé la marionnette a reçu une amende pour une infraction d’ « élimination non autorisée de biodéchets par brûlage ». Nos traditions sont en danger !
Comme tous les ans depuis des lustres, le vendredi suivant le Mardi gras, rendez-vous était donné à 20h, place de la mairie. Le Carnaval sauvage d’Arles arpentait donc les rues du centre-ville ce 7 mars 2025. Un pêle-mêle masqué et déluré, qui danse à travers la ville au son des fifres et des chants. Mais, pour la première fois cette année, la tradition a été réprimée. À partir de l’arrêt au bar le Sarto, un petit groupe de policiers municipaux est intervenu et a suivi, intimidé et surveillé le cortège jusqu’au procès du Caramantran sur les quais du Rhône.
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Comme chaque année, la marionnette géante, Estrasse de son nom, effigie de l’ennemi du peuple, confectionnée pour l’occasion, était brûlée sous les airs d’Adieu paure Carnavas, entonnés par les participants. Mais cette année, la police est là, braquant ses lumières, cherchant à verbaliser cette manifestation non déclarée. Elle identifie et interpelle la personne qui a mis le feu au Caramantran. 135 euros d’amende pour « élimination non autorisée de biodéchets par brulage à l’air libre ».
Pourtant, de manière intelligente, la police nationale avait l’habitude de faire preuve de tolérance en l’absence totale de danger puisque la marionnette est brûlée sur les bords du Rhône. Cette année, la police municipale, pas très au courant des traditions locales, a préféré se déguiser en cow-boy pour la soirée de carnaval. La police municipale a découvert la manifestation avec les nouveaux moyens modernes « des caméras du Centre de supervision urbaine« , raconte Mandy Graillon, élue à la fois à la tradition et à la sécurité de la ville d’Arles. « À la Ville, on n’est pas du tout contre l’événement. Notre but, c’est simplement d’assurer la sécurité, surtout quand il y a l’usage du feu. Si les organisateurs en font la demande il n’y aura pas de problème, il n’y a pas de danger, il n’y a pas de végétation autour sur les quais du Rhône… Il suffirait de faire une demande et qu’un participant prenne un extincteur si ça dégénère. »
Pour l’heure, une des beautés de la manifestation réside dans sa spontanéité et son corolaire : la non institutionnalisation. Occuper librement l’espace, ne pas déclarer l’événement et ne pas demander d’autorisation aux autorités, c’est le principe même du carnaval sauvage. Son organisation relève plus du bouche-à-oreille que de celle d’une association. Une tradition vivante et en mouvement. Que se passera-t-il l’an prochain ? La fête se fera-t-elle perturber à nouveau par la police avec 135 euros à la clé ? Les policiers feront-ils preuve de plus de tolérance envers les traditions locales ? Une personne physique ou morale prendra-t-elle l’organisation du carnaval sauvage sous sa responsabilité ? Une chose est sûre, au moment du jugement dernier, avant que les flammes et le Rhône ne le fassent disparaître, les Arlésiens accuseront immanquablement Estrasse de provoquer bien trop de tracasseries administratives.
Eric Besatti et Clémentine Morot-Sir
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