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La navette du centre-ville prolonge son changement de destination

La navette du centre-ville prolonge son changement de destination

A quoi sert Vi’Arelate, le petit bus électrique du réseau de transport public Arlésien Envia ? Pensée initialement pour les touristes, peu fréquentée l’hiver, la ligne va être prolongée avec un nouveau terminus à Barriol pour tenter d’améliorer la liaison entre les parkings relais et le centre-ville. Une mission qui a évolué depuis l’époque de sa prestigieuse ancêtre : la Starlette.

Boulevard Clémenceau, à « la star », le centre névralgique des bus public arlésiens, il est 11h ce lundi 28 mars et Myriam monte dans la petite navette Vi’Arelate. Elle va voir de la famille à Barriol. Elle prend cette ligne A de temps en temps, « surtout quand la ligne 1 est bondée ». Le terminus du musée départemental de l’Arles antique est à 200 mètres de Barriol. Pratique. Avec elle, une femme avec sa poussette rentre chez elle au quai des platanes, le quartier gitan juste en face du « musée bleu ».

Un bus haut de gamme
La ligne A, c’est une ligne pas comme les autres, un ovni du réseau de transport urbain de l’agglo Envia. Déjà, elle est desservie par des petits véhicules bleu et blanc quand le reste de la flotte est rouge. Puis elle roule à l’électrique pour être plus écolo. À l’intérieur, le ticket à un euro ne coûte pas plus cher qu’ailleurs, mais c’est le luxe : port USB pour charger son téléphone et odeur travaillée avec un diffuseur de parfum.

Pensés pour les touristes, les petits bus partent du parking des Minimes – non loin de la tour Luma – pour rejoindre le musée de l’Arles antique en passant par le centre-ville et le lieu encore communément appelé « la star » : l’arrêt Clémenceau. Une ligne sur laquelle les moyens sont mis, avec un passage toutes les 16 minutes. « Elle marche très bien l’été, avec l’affluence touristique », affirme Claire Cazaly, assistante marketing du réseau Envia. 43 000 voyageurs l’on emprunté sur 2019, dernière année en date non perturbée par le Covid. Au moins de juillet de cette même année, ils étaient 5 800. Selon nos estimations(1), cela représente 3 voyageurs par trajets en moyenne pendant l’année, 4,5 en été.

Capture d’écran du plan de la ligne A installée en juillet 2021. En rose, le circuit du samedi matin lors du marché.

En hiver, la navette est souvent vide. Alors le petit bus fait parler en ville, les observateurs s’interrogent sur son utilité pour les Arlésiens. Une question à peine évoquée à Didier*, un des chauffeurs, qu’il s’énerve gentiment pour prendre la défense de sa ligne : « Vous voyez bien qu’il y a du monde. C’est vrai que l’hiver c’est plus calme. Mais regardez, il sert aussi aux habitants de Griffeuille qui montent à l’arrêt Hoche pour aller en ville », rétorque le conducteur. Selon lui, le mini-bus est aussi utilisé « les jours de marché lorsque des habitants préfèrent se garer gratuitement plutôt que de payer une plus grosse somme en centre-ville. Je le fais moi-même quand je ne travaille pas le samedi. » Actuellement, les parkings du musée bleu, comme celui des Minimes sont gratuits. Aux Minimes, celui de Luma va devenir payant et la Ville d’Arles devrait réaliser un nouveau parking payant aux Minimes pour stocker les voitures des estivants.

Toujours est-il que la ligne est certainement la moins fréquentée de tout le réseau. Quand il manque un chauffeur dans l’équipe, c’est une des deux navettes de la ligne A qui est sacrifiée pour permettre au reste du réseau de fonctionner normalement. Logique.

Nouveau terminus au parking relais de Barriol
Le nouveau parcours de la ligne A a été inauguré en même temps que la tour Luma qu’elle dessert, en juillet 2021. Confirmant sa vocation touristique. Pas la seule affirme Claire Cazaly : « Elle a aussi pour ambition de faciliter l’accès au centre-ville de tous les Arlésiens, notamment en reliant les parking relais au cœur de la cité. ». C’est donc pour cette raison que même l’hiver, la fréquence est maintenue. « Pour que les gens n’aient pas à calculer leur horaire d’arrivée sur le parking, ils savent qu’il y a des navettes toutes les 16 minutes. Ça permet de créer des habitudes de laisser sa voiture au parking », explique une des « marketing » de chez Envia. Et pour renforcer cette fonction (attention exclu !) : le 28 mai prochain, la ligne sera prolongée jusqu’au parking relais « P2 » situé en face du Palais des congrès à Barriol. Un parking encore très peu utilisé. Nom du nouveau terminus : « Cirque romain », à 150 mètres de l’ancien terminus du musée.

Comme à chaque changement, des questions se posent. Le terminus au musée de l’Arles antique, avec son bus stationné en attendant l’horaire, c’était aussi un point de repère pour les touristes. Au lieu d’aller directement à leurs voitures, ils peuvent jusqu’au 28 mai se laisser tenter par cette belle petite navette qui dépose directement en ville sans galère de parking. Sans avoir la tentation de reprendre leur voiture directement pour quitter la ville. A 100 mètres du nouveau terminus, un arrêt est déjà situé en bordure du parking. L’arrêt « Palais des congrès » est desservi par la ligne 1 tous les quart d’heure qui emmène les habitants du quartier au centre ville. N’est-ce pas suffisant ? Autre question : les usages que va générer cette empilement de ligne en si peu d’espace. Les usagers ne vont-ils pas courir entre les deux arrêts pour prendre le bus qui passe le premier en générant des frustrations quand le bus partira alors que des voyageurs courent après ? A voir à la pratique… Dès demain, la ligne A Vi’Arelate ira de parking relais à parking relais. Hier, appelée Navia A, elle allait d’un musée à la gare. Et encore avant ?

De la Starlette du centre-ville à la navette des parkings

Faire l’histoire de la ligne A, c’est ressortir l’histoire d’une légende : la Starlette créée avec la Star (Société des transports d’Arles) en 1984. Cette emblématique estafette du centre-ville d’Arles emmenait les voyageurs gratuitement à travers les petites rues du centre-ville.

Sur le groupe facebook T’es d’Arles si… il suffit de convoquer cette belle appellation sur le mur public pour que remontent souvenirs et anecdotes. Yassine se souvient de faire « des tours de Starlette » avec Jean-Baptiste et ses amis, « à l’époque » encore tout petits. Plus bas, d’autres internautes nous redirigent vers une publication de 2016. C’est une vidéo d’une valeur historique et esthétique exceptionnelle, intitulée, Les bus de ville des années 80 (Arles). Elle a été partagée par un ancien chauffeur : Roland Gire. « Très belle époque », commente Nathalie.

On y voit la Starlette à différentes étapes de sa vie, belle, jaune et bleu, décorée des monuments de la ville : là, porte de la Cavalerie, là en vue embarquée rue du 4 septembre, ici chez elle, à « la star ». Mais le temps passe et estompe les poésies d’hier. Le nom de la Starlette a disparu en 2011 au moment du changement de prestataire au profit de Veolia. Depuis, le réseau de transport d’Arles et de toute la communauté d’agglomération ACCM (Arles, Saint-Martin, Tarascon, les Saintes… ) a été baptisé « Envia ». Et « la Starlette » est devenu « Navia A » et continuait à assurer le transport entre la gare et le musée bleu. Et depuis début 2018, elle ne passe plus dans le centre-ancien.

Capture d’écran du film Les bus de ville des années 80 (Arles). Elle a été partagée sur facebook par un ancien chauffeur : Roland Gire.

« Il existe un petit film où l’on voit la starlette bleu et violette… peinte par mon mari, qui travaillait aux cars », commente Bernadette Garcia Gachet sous notre publication sur le groupe T’es d’Arles si…

Autre version de la starlette présente dans le film Les bus de ville des années 80 (Arles).

 

Dans les petites rues du centre, la navette en triporteur cycliste Hopla assure désormais le service, gratuitement. Didier n’est pas nostalgique de la Starlette avec ses passages à quelques centimètres des badauds quand elle devait frayer autour des Arènes. « C’était dangereux et un exercice périlleux pour les conducteurs ». Il ne regrette pas non plus quand les jeunes ingérables montaient dans son véhicule pour faire des tours de ville et « prenaient la place des personnes âgées qui, elles, avaient vraiment besoin du service ».

La Starlette au début des années 2010, avec son buste de César collé sur les vitre. On a retrouvé notre célébrité arlésienne sur un site de photo de véhicule de collection suisse : autoalmanach.ch. Photo DR

En 2011, la Star laisse place à Envia pour gérer le réseau de transport de bus arlésien. Et la Navia A remplace la Starlette. La gratuité comme le passage par le centre-ancien est abandonné en 2018 avec un réseau de ligne totalement repensé. Photo postée par Valou JFM sur T’es d’Arles si… en commentaire à notre publication.

Vi’Arelate (à droite) a remplacé la Navia A depuis juillet 2021 pour desservir la tour Luma et le parking des Minimes et non plus la gare, désormais desservie par la ligne 1. Quand une des navettes électriques est en maintenance, les anciens bus rouge de la Navia A ressortent pour assurer la ligne A.

Vi’Arelate, l’héritière, doit encore se faire un nom et la preuve de son utilité comme son illustre ancêtre, pour servir touristes comme habitants. Parviendra-t-elle à dépasser son statut de curiosité du boulevard des Lices pour devenir un moyen efficace pour en écarter les automobilistes ? Changer les mentalités, une immense mission pour une si petite navette.

Sami Belahmer avec E.B.

1. Nous avons basé nos calculs sur le chiffre déclaratif d’Envia pour 2019 (43 000 voyageurs) rapporté au nombre de passage du bus constaté sur les fiches horaires en 2021 : 14 676 (qui est sensiblement le même que celui de 2019). C’est approximatif mais donne une idée de la fréquentation. Les chiffres précis sont détenus par communauté d’agglomération Arles Crau Camargue Montagnette (ACCM), autorité organisatrice des transports dont le cabinet du président est en train de traiter notre demande. A savoir si elle aboutira ou tombera aux oubliettes comme souvent pour les demandes de l’Arlésienne. En attendant, voici le rapport d’activité 2019 voté en novembre 2020. Le rapport d’activité 2021 sera rendu le 31 mai 2021 par Transdev, la société choisie depuis 2011 par l’ACCM pour assurer le service d’Envia. Ensuite, les élus de l’ACCM soumettront au vote le document lors d’un conseil communautaire. Nous le publierons à ce moment là.

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